Sur la vie numérique…

Edward Snowden nous dit :

« Ils peuvent presque vous observer formuler vos idées au fur et à mesure que vous les tapez sur le clavier » !

 

Cette mise en lumière des systèmes de surveillance de masse a le mérite de faire émerger sur la place publique le débat sur la protection de la vie privée.

Bien avant l’affaire Snowden, nous nous sommes tous aperçu que pour les géants de l’Internet, les données collectées auprès des utilisateurs sont devenues la mine d’or sur laquelle se greffe un modèle économique lucratif : comme les publicités ciblées et des services adaptés aux comportements.

Le principe en vigueur de ce que l’on appelle « masses de données » (big data) est que toute donnée a une valeur, et, qu’en détruisant une donnée on perd de la valeur. De nos jours, on conserve le maximum de données, même si leur utilité n’est pas a priori évidente. Avant, on ne conservait que les données les plus utiles.

Que deviennent toutes ces données ? Les données publiques sont-elles assez bien protégées ? A qui appartiennent nos données personnelles ?

On doit certainement ouvrir ces masses de données à la recherche scientifique et à l’innovation ! Mais dans quel cadre ?

Au croisement de la liberté de conscience et de la propriété personnelle, à l’ère du tout numérique, les questionnements concernant la vie privée sont nombreux. Le sujet est un exemple significatif de complexité technologique, économique, sociale, politique, voire environnementale ! En feuilletant la synthèse presque exhaustive consacrée à ce sujet par le cahier du CNIL, on se rend facilement compte qu’une expertise indépendante sur le sujet est pratiquement impossible.

Ce que l’on appelle vie privée n’est pas un concept global. C’est un ensemble déterminé socialement et culturellement. Les points de vue européens, américains et asiatiques sont bien évidemment différents.

banner CPDP 2014Les intérêts économiques et stratégiques en jeux sont  très importants ! Il peut être assez instructif de regarder au moins les sponsors de la 7e conférence « Computers, Privacy & Data Protection » (Bruxelles, janvier 2014).

Et les prises de position sont souvent partisanes ! Pour s’en rendre compte, il suffit de consulter les rubriques dédiées de La Quadrature du Net ou du Wall Street Journal (en anglais).

Outre Atlantique, on peut remarquer la prise de position intéressante de la Professeure Nissenbaum.

logo des assises

 

 

Voici comment les Assises nationales de la recherche stratégique  (du 13 décembre 2013) plantent le décor avec force et gravité :

 

La première table ronde portera sur les vulnérabilités liées à l’hyper-connexion du monde. Le big data et les algorithmes qui lui sont associés enserrent progressivement l’individu et les entreprises dans des systèmes opaques de surveillance et d’analyse comportementale, dessinant une « géopolitique du net » et de nouveaux rapports de puissance. Supports potentiels de manipulations de toute sorte, ils modifient progressivement la notion même de propriété intellectuelle, de réputation, de mémoire et même d’identité.

Quelles règles appliquer ?

  • 1 ère : La primauté du politique sur le réglementaire et de ce dernier sur le technologique. Le politique doit anticiper les règles !

On constate que la vitesse de régulation est inférieure à la vitesse des changements. Les changements sont très rapides mais ceux qui ont LES MOYENS s’adaptent aussi vite …Force est de constater que dans ce domaine les règles courent après la réalité.

  • 2e : Ne pas confondre ce que la technologie permet et ce que la loi ou la morale admettent !

Par exemple, la règle qui stipule une utilisation appropriée aux contextes (plate forme technologique, secteur public ou privé, modèle économique,…) et aux paramètres (acteurs, types d’information, niveaux de confidentialité,….) est trop générale ; elle met tout le monde d’accord, mais reste inapplicable !

  • 3e : Les flux d’information générés par un individu sont sa propriété inaliénable et non transmissible. Il peut les détruire ou seulement en concéder l’utilisation. Mais il ne peut pas vendre !

Les données personnelles ne sont pas une marchandise ! Elles ne peuvent pas servir de monnaie. Le consentement requis en échange de la gratuité des services rendus est faussé ! Il existe une asymétrie évidente de savoir : les gens ne sont pas tous digitaux ! Ni avocats ! Le principe du libre échange de biens et de services n’est évidemment pas applicable aux informations (données) tracées par des personnes ou leurs objets connectés !

  • 4e : Déterminer une frontière public-privé !

L’ensemble des données représentent bien un bien social. Si elles constituent de la valeur, il serait normal que tout volume de données stocké puisse être imposé.

  • 5e : Laisser de la place à l’anonymat dans l’espace public ; proposer un certain nombre de services numériques anonymisées ! Et instaurer, avec quelques exceptions liées la mémoire sociale, un droit à l’oubli !

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